17 septembre 2021

Vincent De Wulf, réviseur d'entreprises

 

Quels sont les points d’attention du professionnel en matière d’évaluation ? Comment identifier les erreurs à ne pas commettre ? L’objectif est d’attirer l’attention des professionnels sur ces points critiques afin d’avoir une idée de la pertinence des travaux effectués ou à effectuer.

 

1. L’actif net comptable

L’actif net comptable n’a pas de sens économique mais est un concept comptable. Il sert surtout de référence dans des cas de liquidation et pour des sociétés de patrimoine. L’usage de l’actif net suppose souvent un arrêt des activités.

Les professionnels utilisent souvent l’actif net lorsque le rendement est faible et un multiple de rentabilité lorsque celle-ci est élevée. Les approches sont différentes et en total décalage. Ainsi, pour une même société industrielle :

  • Le vendeur attirera l’attention sur la sous-évaluation de son parc machines, la bonne qualité de ses actifs (stocks, créances commerciales), son faible endettement, et l’absence de comptabilisation d’un goodwill ;
  • L’acheteur attirera l’attention sur les besoins d’investissements, sur le besoin de financement des actifs circulants, sur le besoin de rémunérer l’actionnaire.

2. Moyennes des méthodes

Faire une moyenne entre la valeur de l’actif net et la valeur de rendement suppose sa liquidation et sa continuité en même temps, ce qui est en totale opposition.

Qui plus est, si l’on est dans une logique de cessation des activités il faut tenir compte de tous les frais inhérents à la clôture (perte sur actifs, frais de clôture, …).

 

3. Le PER

Le PER tient compte de la valeur des actions (cours) et du résultat net, en étant un multiple du bénéfice net. Un PER de 13 signifie que l’acquéreur est disposé à payer 13 fois le bénéfice par action. Cette approche ne tient pas compte du niveau d’endettement, alors que d’autres méthodes considèrent l’endettement comme un élément ayant une forte incidence.

 

4. Valeur d’entreprise et valeur des actions

La valeur des actions est la valeur d’entreprise diminuée de l’endettement et augmentée de la trésorerie excédentaire disponible.

Il faut donc bien analysé les flux financiers : les multiples utilisés pour valoriser les actifs économiques (avant prise en compte du financement par endettement – ex EBIT-EBITDA) ne sont pas les mêmes que les multiples donnant une valeur des capitaux propres (après frais financiers – ex le résultat net).

Par ailleurs, deux sociétés ayant une rentabilité similaire mais un endettement net différent auront des valorisations différentes.


5. Analyse stratégique insuffisante

L’analyse stratégique permet de comprendre la situation actuelle et d’avoir une vision sur le futur. Souvent le futur est considéré comme une simple poursuite du passé.

Il faut examiner le potentiel réel de l’entreprise et ses capacités à performer dans le futur en tenant compte de l’évolution de son environnement, ainsi que le maintien de ses avantages concurrentiels. L’environnement se modifie de plus en rapidement en raison de l’évolution technologique rapide.

 

6. Cash-flows irréalistes

Souvent les résultats passés sont extrapolés mécaniquement sans tenir compte de l’évolution de la concurrence, et les besoins d’investissements et la variation du besoin en fonds de roulement ne sont pas repris dans les calculs.

Cette évaluation n’est possible que si l’on a correctement analysé et compris les causes des performances du passé et tenu compte de l’évolution future du marché.

 

7. La valeur terminale dans le DCF

La valeur terminale utilisée dans l’approche DCF tient compte du flux de trésorerie. Ce dernier pourra être sur/sous-estimé du fait d’une mauvaise estimation des investissements futurs et du BFR.

 

8. Le taux d’actualisation

Le taux d’actualisation est généralement composé du taux sans risque, de la prime de rendement attendue par le marché et de la prime spécifique à la société tenant compte de sa taille, de sa position concurrentielle, de ses forces et faiblesses.

L’acheteur et le vendeur argumenteront pour augmenter ou diminuer ce taux, ce qui risque de fausser le calcul.

 

9. Les coefficients de comparaison

La comparaison avec des entreprises similaires est pratique pour déterminer la valeur d’une société. Dans les faits il y a peu de bases de données disponibles pour les PME et les références concernent souvent des très grandes entreprises dont les conditions de transaction sont connues.

Par ailleurs la comparaison avec une transaction opérationnelle (synergie) n’est pas pertinente pour une transaction purement financière (investissement).

De plus les multiples doivent être appliqués à des entreprises ayant un taux de rendement proche et/ou comparable.
In fine, se baser sur le prix de transactions similaires n’est pas forcément un bon indicateur de comparaison car le prix peut comporter des aspects purement irrationnels.

 

10. Start-up et sociétés en difficulté

Dans ce type d’évaluations il ne peut y avoir de références au passé et la méthode des comparables n’est pas applicable, d’où les difficultés rencontrées. Pour les start-up l’incertitude est importante, d’où l’importance de bien évaluer les probabilités de réussite : celles-ci peuvent être faibles mais les gains peuvent être importants en cas de réussite.

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